Les tensions avec l’Algérie freinent les exports de blé français
TNC le 15/11/2024 à 10:43
Les relations diplomatiques entre la France et l’Algérie se tendent encore depuis l’été, ce qui rebat les cartes des exportations françaises de blé tendre.
La faible productionde blé tendre cette année en France devrait limiter les exports vers les pays tiers (hors Europe, donc) sur la campagne de commercialisation en cours : FranceAgriMer les estimait jusqu’ici à 4 Mt pour 2024/25, contre plus de 10 Mt sur les deux campagnes précédentes.
Et ils pourraient se réduire encore davantage : l’établissement public vient d’abaisser sa prévision à 3,9 Mt. Habasse Diagouraga, chargé d’études économiques sur les céréales, explique : « On est très en retard sur le réalisé, c’est surtout en lien avec l’absence de l’Algérie dernièrement sur notre marché ».
Client historique et majeur de la France, l’Algérie achetait 2 à 6 Mt de blé français chaque année dans les années 2010. Puis elle a réduit ses importations : autour de 1,8 Mt sur les campagnes 2021/22 et 2022/23, et 1,6 Mt sur 2023/24. Sur la campagne en cours, les douanes françaises relèvent 31 500 t de blé français importées par le pays en juillet, puis plus rien.
Il y a quelques semaines, « un appel d’offre n’a pas été envoyé aux opérateurs français, note Benoît Piètrement, président du conseil spécialisé « grandes cultures » de FranceAgriMer. Des raisons diplomatiques font que les relations avec l’Algérie sont plus que compliquées ».
Tendues depuis trois ans, elle se sont encore davantage crispées à l’été, quand Emmanuel Macron a soutenu publiquement la position marocaine sur le Sahara occidental, reconnaissant la souveraineté du Maroc sur ce territoire contesté. Alger, qui soutient les indépendantistes du mouvement Front Polisario, a alors rappelé son ambassadeur en France.
Fin octobre, le président français a renouvelé sa position devant le Parlement marocain, au cours d’une visite diplomatique. Renforçant la colère côté algérien. « Macron en remet une couche… au risque de sectionner définitivement le fil d’Ariane qui le retient encore à Alger », écrit par exemple le quotidien francophone El Watan.
Le 7 novembre, les services du premier ministre algérien ont démenti une rumeur selon laquelle Alger s’apprêtait à rompre les échanges commerciaux avec la France, et Paris a aussi indiqué ne pas être au courant d’une telle décision, a relevé l’agence Reuters.
Cette situation résonne avec une autre crise diplomatique, en novembre 2021, qui avait mené l’Algérie à modifier son cahier des charges en faveur d’une plus grande ouverture au blé russe.
« Pour des raisons indépendantes de tout ce qui concerne les céréales, les relations diplomatiques avec la France sont compliquées (…). Voilà, on a perdu ce marché, mais il faut qu’on soit positionnés sur d’autres – Maroc, pays d’Afrique subsaharienne -, et il y a parfois des besoins de ventes très ponctuels, avec des marchés qui peuvent s’ouvrir », reprend Benoît Piètrement.
Qui reste optimiste : « Il faut voir dans le temps : il y a quelques années, c’était compliqué pour d’autres raisons avec le Maroc, et les relations sont redevenues très bonnes… Il ne faut certainement pas lâcher ! ».