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Levée de boucliers pour défendre l’Agence bio, menacée de disparaître


AFP le 20/01/2025 à 18:45

« Ne pas casser » un outil au service de la transition agricole et alimentaire : l'ensemble des acteurs de la filière biologique ont appelé lundi le gouvernement à maintenir l'Agence bio, menacée d'être supprimée après le vote d'un amendement de la droite sénatoriale.

Le président de cette plateforme nationale, créée en 2001 pour promouvoir une agriculture sans pesticide et engrais de synthèse, a dénoncé auprès de l’AFP une attaque en règle « contre la transition alimentaire et agricole », objectif pourtant affiché par le gouvernement.

Le bio « est l’affaire de tous », ont réagi ensemble les administrateurs et responsables des organisations de la filière réunis au sein de l’Agence bio, parmi lesquels des représentants de l’association des producteurs (Fnab), des chambres d’agriculture, de la Coopération agricole ou des distributeurs (Carrefour, La Vie Claire).

« Il y a une agence dédiée à cette agriculture d’intérêt général qu’il ne faut pas casser en dispersant son patrimoine et son expertise aux quatre vents. Alors que le bio est en croissance chez tous nos voisins, en particulier l’Allemagne, ne prenons pas l’autoroute de l’histoire à contresens ! », ont-ils écrit dans un communiqué commun.

« Une saignée dans les champs »

« Supprimer leur Agence revient à dire aux 215 000 emplois du secteur, et à un agriculteur sur 6, qu’il n’y a pas de place pour la diversité des modèles. Cela occasionnerait une saignée démographique dans les champs. 25 % des installés en agriculture l’an dernier étaient en bio », soulignent-ils.

Producteurs comme ONG ont souligné le « succès » et « l’efficience » du travail de l’agence, considérée comme indispensable à une filière dans la tourmente depuis 2021, quand le marché a commencé à se retourner sous l’effet de l’inflation après des années de croissance à deux chiffres.

« Cette suppression, voulue par la droite sénatoriale et à laquelle ne s’est pas opposée la ministre de l’agriculture, serait un coup très dur pour la transition alimentaire et agricole », a souligné auprès de l’AFP Jean Verdier, le président de l’Agence bio.

Durant l’examen au Sénat de la mission budgétaire dédiée à l’agriculture vendredi soir, la chambre haute a voté pour supprimer les crédits de l’Agence bio, estimant que ses missions pouvaient être reprises par d’autres opérateurs comme l’établissement public FranceAgriMer, « ou réinternalisées par les services du ministère de l’Agriculture ».

« Économies de bout de chandelle »

La proposition, initiée par la droite, a reçu un accueil bienveillant de la ministre Annie Genevard, qui a rendu un « avis de sagesse », ni favorable ni défavorable, à cette mesure, jugeant l’idée « pertinente ».

« Cet amendement implique une annulation de crédits à hauteur de 2,9 millions d’euros », a-t-on précisé lundi au ministère, soulignant que toute « rationalisation » ne pourrait « être réalisée sans une réflexion approfondie et partagée ».

« Des économies de bouts de chandelle » dénoncées par le communiqué du secteur, qui reviendraient à « passer un plan social pour les 23 salariés de droit privé » de l’Agence bio et à « supprimer le seul lieu d’expression et de concertation national de l’ensemble de la filière ».

Supprimer l’Agence bio contribuerait à la « déstructuration de la filière »,
a prévenu la Confédération paysanne, 3e syndicat agricole, estimant que l’État devrait au contraire « s’employer, par tous les moyens, à respecter et à
atteindre les 20 % de bio dans la restauration collective, et à mettre en place
des politiques publiques réellement favorables à l’accompagnement » des
agriculteurs en bio.

« Inconsistance »

Pour son président Jean Verdier, l’Agence bio assure « trois missions » spécifiques « difficilement transférables » : un « observatoire du marché », la « communication et pédagogie à destination du public » et la « structuration des filières au travers du Fonds Avenir bio, doté de 18 millions d’euros ».

La Fédération nationale d’agriculture biologique (Fnab) a dénoncé « l’inconsistance du gouvernement sur les questions agricoles », alors que le ministère (sous Marc Fesneau) avait au contraire augmenté les enveloppes de communication de l’agence.

De son côté, Génération Futures va jusqu’à demander « la démission de la ministre de l’agriculture » qui a, selon l’ONG, « manqué à son devoir de soutien de toutes les agricultures dans cette affaire ».

L’objectif de l’État, réaffirmé en avril dernier, est d’atteindre 18 % de la surface agricole utile en bio d’ici 2027, contre environ 10 % aujourd’hui.

En 2023, le marché du bio représentait 12 milliards d’euros, relativement stable en valeur (du fait d’une hausse des prix de 7,7 %) en dépit d’une baisse significative des volumes écoulés, selon des chiffres de l’Agence bio. La part du bio dans les achats alimentaires des Français a reculé à 5,6 % en 2023, contre 6,4 % en 2021.