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Limitation des prélèvements d’eau : des irrigants contre-attaquent


AFP le 11/09/2024 à 09:05

Du bassin de l'Adour au Marais poitevin, de nombreux irrigants sont vent debout en Nouvelle-Aquitaine contre la limitation des prélèvements ordonnée durant l'été par la justice administrative, multipliant actions revendicatives et recours juridiques.

Mercredi, les syndicats d’exploitants agricoles FNSEA et JA dans la Vienne, avec l’Association des irrigants de ce département (Adiv), appellent à manifester à Poitiers contre une décision rendue par le tribunal administratif de la ville.

Le 9 juillet, celui-ci avait réduit d’un quart, à titre provisoire mais avec exécution immédiate, les prélèvements d’eau autorisés pour l’irrigation agricole dans le Marais poitevin, en jugeant « excessifs » les volumes que les services de l’État avaient accordés, en 2021, pour cinq ans.

Le 23 août, « plus de 800 agriculteurs, coopératives, négoces et entreprises » ont répliqué en saisissant le même tribunal d’un recours en tierce opposition : ils lui demandent d’annuler sa décision et de rejuger l’affaire, cette fois, « en leur présence ».

Décision attendue d’ici la fin de semaine

« Ce jugement impacte considérablement la situation des agriculteurs irrigants, dont la pérennité de certaines exploitations est en jeu, mais également des sociétés coopératives, de négoces ou d’autres entreprises spécialisées dans l’irrigation », expliquent les requérants qui reprochent à la juridiction, saisie par une association de défense de l’environnement, d’avoir statué sans entendre leur voix.

La date de l’audience à Poitiers n’est pas encore fixée mais à l’autre bout de la Région, dans les Pyrénées-Atlantiques, plus de 500 structures ont engagé une action similaire devant le tribunal administratif de Pau.

Le 2 août, cette juridiction, saisie en référé par des associations environnementales, avait suspendu l’arrêté interpréfectoral encadrant les prélèvements d’eau pour l’irrigation dans le bassin de l’Adour, ordonnant de diminuer les volumes autorisés jusqu’au 31 octobre.

Le recours en tierce opposition des irrigants a été plaidé lundi à Pau et la décision est attendue d’ici la fin de semaine.

« Spectateurs »

Selon l’avocat qui les représente à Pau et Poitiers, Me Laurent Verdier, les restrictions décidées en plein été concernent des milliers d’exploitants qui « n’ont plus envie d’être de simples spectateurs ».

« Ils ne veulent plus que leur destin se joue sans qu’ils puissent se défendre », poursuit le conseil. La stratégie, nouvelle, de ces actions de masse vise à « incarner le contentieux » et à « reprendre la main » sur les procédures, ne serait-ce que pour pouvoir faire appel aux procès.

Elle intervient alors que les contentieux se multiplient dans la région autour de l’eau, notamment contre les chantiers de « méga-bassines », réserves d’irrigation promues par l’État et contestées par des associations écologistes. Au printemps, un décret a réduit le délai pour former un recours dans ce domaine, le gouvernement s’engageant parallèlement à accélérer les projets de stockage de l’eau.

L’appel à manifester mercredi à Poitiers concerne également des retenues d’eau prévues dans le bassin du Clain (Vienne). Jeudi, la Commission locale de l’eau doit en effet se prononcer sur une version remaniée de l’étude d’impact écologique, dont la validation conditionne les financements publics.

Tous les syndicats agricoles vent debout

La première mouture, non examinée officiellement, avait conclu l’an dernier à un manque d’eau pour remplir les « bassines » en l’état du partage de la ressource entre distribution d’eau potable, agriculture et industrie.

La FNSEA, première organisation de la profession, est favorable aux réserves d’irrigation mais demande à la Commission de ne pas valider cette nouvelle étude dont les préconisations « s’avéreraient catastrophiques pour le secteur agricole ».

La Coordination rurale, syndicat qui dirige la Chambre d’agriculture de la Vienne, s’oppose depuis le début aux contreparties environnementales du projet.

Après la décision du tribunal de Pau début août, la Confédération paysanne avait estimé que « baisser les volumes de prélèvement de manière uniforme ne permet pas de s’attaquer au problème dans sa globalité », dénonçant un « manque d’anticipation et de pilotage par l’État ».

Mais plutôt que de « remettre en cause la justice », le syndicat appelle « tout le monde » – institutions agricoles, pouvoirs publics et représentants des citoyens – à « se mettre autour de la table pour trouver des solutions durables ».