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Biotechnologies végétales

NGT, « pourquoi se priver d’une technologie avec un vrai potentiel ? »


TNC le 24/10/2023 à 13:56
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Pour l'AFBV, il est urgent que la Commission, le Conseil des ministres et le Parlement européen adoptent la proposition de la Commission sur les NGT (© Adobe Stock/Cassis)

Après plusieurs mois de débats animés au sein de l’UE autour des réglementations sur les NGT, l’AFBV se prononce en faveur de la proposition présentée le 5 juillet par la Commission européenne, jugée bénéfique en matière d’innovation. Mais selon l'association française des biotechnologies végétales, certaines clarifications s’avèrent nécessaires.

L’AFBV (Association française des biotechnologies végétales) a affiché son soutien au projet de règlement de la Commission européenne sur les NGT (nouvelles techniques d’édition du génome), en attente de validation par le Conseil de l’Europe et le Parlement européen.

Cette approche représenterait « un changement fondamental dans la mécanique de réflexion réglementaire » selon l’AFBV, avec un principe de base établissant deux catégories se basant sur la nature de la plante. Il y a ainsi d’un côté les plantes NGT-1, « pouvant apparaître naturellement ou être produites par sélection conventionnelle et leur descendance », non soumises à la réglementation sur les OGM et la catégorie des NGT-2, classées OGM et relevant de la législation correspondante.

L’association approuve ainsi ce projet, encadrant les nouvelles techniques de sélection, développées depuis 2001, incluant la mutagénèse et la cisgénèse, propice au « développement et la commercialisation, en Europe, de plantes NGT porteuses d’innovations très attendues ». L’AFBV réclame néanmoins certaines précisions, listées dans des commentaires sur ce projet de règlement publiés en association avec leur homologue allemand WCG.

 Clarifier les conditions d’usage des plantes NGT-1

« Nous demandons plus de clarifications. Le projet de règlement fixe un nombre de 20 modifications acceptées pour les NGT-1. Dans ce cadre, nous souhaitons savoir comment sont comptées ces modifications sur le blé qui possède 3 génomes. Il n’est pas possible d’obtenir le caractère souhaité sans modification des 3 gènes, mais dans ce cas doit-on en compter trois ou une ? », s’interroge Georges Freyssinet, président de l’AFBV.

Il n’y a pas de remise en cause du schéma proposé, mais une demande de précision sur les critères de classement des plantes dans la catégorie 1, ainsi que celui de la limite de 20 nucléotides, à expliciter. L’association souhaite également que des précisions soient apportées sur les « types de croisements qui peuvent être réalisés », étant donné que les plantes NGT de catégorie 1 peuvent être obtenues à partir d’une descendance issue du croisement de plantes NGT-1 vérifiées.

Enfin, l’AFBV questionne l’exclusion des plantes NGT du marché de l’agriculture biologique inscrite dans le projet de réglementation. « Pourquoi dire non a priori à une technologie et les produits qu’elle peut apporter ? Ne pourrait-on pas dire aux agriculteurs bio qu’ils ont la possibilité d’utiliser les plantes NGT- 1, s’ils le souhaitent ? C’est un type d’agriculture qui écarte les traitements phytos avec des pesticides de synthèse et ces plantes apportent un potentiel intéressant », estime le président de l’AFBV.

L’importance de l’adoption d’un accord au niveau européen

« Ce projet s’il est adopté rapidement pourrait permettre de développer les plantes NGT en Europe et de surmonter une partie des catastrophes environnementales qui menacent nos cultures, de la sécheresse aux inondations », affirme Georges Freyssinet. Face aux nombreuses remises en question visant les NGT, assimilés par certains à de « nouveaux OGM », synonymes d’une uniformisation des cultures, l’association défend le potentiel de ces techniques susceptibles de favoriser la biodiversité, d’améliorer la résistance face aux agents pathogènes, et d’augmenter les rendements.

En Espagne, en dépit de l’utilisation du maïs insecticide mon810 de Monsanto, pas moins de 250 variétés différentes seraient ainsi recensées. Les biotechnologies végétales permettent en outre de créer de nouveaux gènes issus de la « mutagénèse induite in vitro », selon l’AFBV. Il est ainsi possible d’obtenir des plantes résistantes aux stress abiotiques, induits par des conditions météorologiques extrêmes, et aux stress biotiques lié aux agressions d’autres organismes vivants tels que les insectes ou les champignons.

A cela s’ajoute l’amélioration des qualités nutritives apportée par ces plantes NGT-1, permettant d’assurer une meilleure protection vasculaire avec les tomates riches en gaba, actuellement produites au Japon ou de produire du blé sans gluten. Un gain peut aussi être obtenu au niveau du rendement, avec toujours dans le cas du maïs, « la possibilité d’obtenir 16 rangs de grains au lieu de 14 », et aussi grâce à une meilleure fixation de l’azote, réduisant la nécessité du recours aux engrais.

L’AFBV défend le bénéfice apporté au consommateur au travers de la réduction du traitement insecticide obtenu grâce à la sélection biologique des espèces et la transgénèse permettant notamment d’augmenter la tolérance aux insectes et aux herbicides. Si le ministère de l’agriculture ou encore la FNSEA se prononcent en faveur du développement des NGT pour renforcer la durabilité et la compétitivité de l’agriculture européenne, des voix discordantes se font néanmoins entendre sur le sujet.

Georges Freyssinet, président de l’AFBV souhaite une adoption rapide du projet de règlement sur les NGT. (© Terre net Média)

La Confédération paysanne soutient sur la « base d’analyses génétiques et biochimiques poussées » que ces nouvelles techniques de sélection concernent des « plantes contenant plusieurs dizaines de milliers de gènes organisés très précisément dans l’espace et dans un ordre dont la moindre modification peuvent avoir de graves conséquences sanitaires ou environnementales imprévues ». Le syndicat dénonce en outre des « prétendues difficultés de traçage des OGM/NGT justifiant leur dérèglementation, ainsi que les immenses profits financiers garantis par les brevets ».

Selon des associations environnementales telles que Pollinis, Greenpeace ou encore FNE ( France nature environnement ), opposées au projet de règlement sur les NGT, « très peu de ces produits sont destinés à répondre aux problématiques causées par le dérèglement climatique, et la majorité des OGM développés jusqu’ici et les nouveaux produits en cours de développement le sont pour tolérer des herbicides, produire des herbicides de type nouveau, améliorer les rendements ou encore répondre à des objectifs superficiels tels que l’amélioration des qualités gustatives, esthétique ou de conservation des produits ».

Le conseil de l’Europe et le Parlement européen se réuniront lors d’un trilogue afin de faire émerger une législation qui puisse être adoptée et publiée, avant une entrée en vigueur dans un délai de deux ans.