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Pause attendue du maïs américain, les marchés agricoles « entre deux eaux »


AFP le 18/12/2024 à 18:50
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Mardi 17 décembre, le cours du grain jaune est monté à son plus haut niveau à Chicago depuis le 20 juin (© FJansseune, Banque d'images FranceAgriTwittos)

Le cours du maïs aux Etats-Unis a atteint un sommet en six mois mais devrait marquer le pas, selon les analystes, dans un contexte de volatilité des marchés des céréales et oléagineux nourrie par les incertitudes climatiques et commerciales.

Le cours du grain jaune est monté mardi à son plus haut niveau à Chicago depuis le 20 juin, tandis qu’en Europe il se maintenait. Sur Euronext, il s’affichait mercredi à environ 207 euros la tonne (209 euros une semaine plus tôt).

Cette reprise américaine, alimentée par les prévisions du département à l’Agriculture (USDA) sur une hausse de la consommation d’éthanol et des exportations, semble cependant s’essouffler, notamment devant la concurrence attendue de la production latino-américaine.

« Le maïs est tiré vers le bas par le soja et le blé, avec, en plus, la perspective d’une récolte encore plus abondante que prévu au Brésil, qui a une météo idéale, » relève Dax Wedemeyer, analyste pour la maison de courtage US Commodities.

L’institut public brésilien Conab table sur une production en hausse de 3,4% sur un an, alors que la récolte approche.

Avec le retour de Donald Trump, l’inconnue demeure aussi sur la future politique américaine sur l’éthanol, les agrocarburants absorbant aujourd’hui près de la moitié de la production de maïs aux Etats-Unis.

Les opérateurs soulignent aussi le « niveau historiquement faible » du real face au dollar, favorisant mécaniquement la compétitivité brésilienne, ajoute Michael Zuzolo, du cabinet Global Commodity Analytics and Consulting.

Incertitude des échanges sous Donald Trump

Les autorités américaines auraient-elles surestimé leurs projections? « Je peux comprendre que le marché se pose des questions sur la demande (à l’exportation) estimée par l’USDA, note M. Zuzolo, sachant l’incertitude relative aux échanges internationaux » sous Donald Trump, qui a promis des droits de douane accrus à nombre de partenaires commerciaux. Le Canada en particulier est à ce jour le premier acheteur d’éthanol américain.

Dans le même temps, le soja américain, sud fond d’indicateurs chinois décevants et de bonne récolte latino-américaine, est tombé mardi à son plus bas niveau depuis un mois et demi. « Je ne pense pas que maïs et blé puissent résister à ce niveau de pression », et ils risquent de se replier dans son sillage, estime M. Zuzolo.

Sur Euronext, le blé est en situation un peu plus favorable, à son plus haut depuis fin octobre, après avoir régulièrement reculé depuis son record historique de l’été 2022.

A l’origine du rebond, une demande intra-européenne « plutôt bonne », mais aussi un achat important venu d’Arabie saoudite (800 000 tonnes), expliquent des experts, qui citent la Baltique, la Bulgarie, la Roumanie… parmi les potentiels fournisseurs saoudiens, non divulgués officiellement.

Moissons de blé de l’hémisphère Sud

Pour autant, « que va devenir ce rebond? » s’interroge Damien Vercambre, courtier du cabinet Inter-Courtages, pour qui « il n’y a pas de raison que l’on reparte fortement à la hausse tant qu’on n’est pas sorti de l’hiver. On est un peu entre deux eaux ».

Comme pour le maïs et le soja, les marchés attendent de voir l’effet des moissons de blé de l’hémisphère Sud, de l’Argentine ou de l’Australie par exemple. Qu’en sera-t-il aussi des futures récoltes de la Russie, premier exportateur mondial de blé ? Quant aux oléagineux, soja comme colza, ils suivent le repli des huiles, notamment de l’huile de palme. « C’était peut-être monté trop haut, il y a une correction », note M. Vercambre.

Autre source d’expectative pour les marchés des céréales, le repli drastique des achats de la Chine en 2024, après plusieurs années de fortes commandes en maïs, blé et orge.

« La grande question des mois prochains c’est « vont-ils reprendre? » », souligne Sébastien Poncelet, analyste chez Argus Media France.

« On est dans un monde où, de plus en plus, le maître mot est « incertitude permanente ». L’incertitude climatique et puis l’incertitude géopolitique, qui va de Trump à la Chine », relève-t-il. Quand hier les marchés regardaient avant tout « l’offre, en fonction des récoltes », aujourd’hui le paramètre demande peut être aussi volatil : « il devient compliqué de tracer des perspectives » de long terme.