Quels leviers des collectivités pour préserver le foncier agricole ?
TNC le 04/02/2025 à 14:30
Si la hausse des rendements a longtemps compensé la diminution du foncier agricole disponible par habitant, cette dynamique est aujourd’hui enrayée par le changement climatique, mais également par les nouvelles pratiques comme l’agroécologie, rendant l’enjeu de la protection des terres agricoles encore plus crucial. En quoi les collectivités locales ont-elles un rôle à jouer ?
Un foncier agricole plus rare, des rendements en baisse, et des besoins croissants à la fois en raison d’une augmentation de la population, mais aussi en matière de production d’énergie : la pression exercée sur les terres agricoles est donc de plus en plus forte, résume Nicolas Agresti, directeur du service Etudes, Veille et Prospective de la FNSAFER.
L’enjeu de la préservation des surfaces agricoles était l’une des thématiques abordées par les 22e rencontres de droit rural organisées par Agri’idées et l’AFDR le 30 janvier. Le foncier est en effet au croisement de plusieurs dynamiques, dont la préservation de la ressource en eau, explique Nicolas Agresti. Les collectivités bénéficient depuis quelques années d’un droit de préemption d’aire d’alimentation de captage qui leur permet d’intervenir sur les zones autour des points de captage. S’il a d’abord fallu définir les zones de captages prioritaires, c’est désormais chose faite et « il est très probable que dans les années à venir, on assiste à une multiplication de ces demandes » de préemption, estime Nicolas Agresti. Néanmoins, cet outil doit être associé à de l’animation foncière pour maîtriser rapidement le périmètre de captage, car il n’est pas suffisant à lui seul.
Artificialisation, consommation masquée
En parallèle, le foncier agricole reste menacé par l’artificialisation, qui a certes fortement diminué ces dernières années, d’une part grâce à la loi sur le Zéro artificialisation nette (ZAN), mais également en raison du contexte immobilier et à l’augmentation des prix des chantiers. Globalement, le phénomène concerne les couronnes périurbaines, les zones frontalières, littorales, où l’on retrouve également un fort enjeu d’alimentation de proximité.
Les collectivités peuvent, à ce niveau, agir via des outils dédiés, comme les zones agricoles protégées, ou encore les PAEN (périmètres de protection et de mise en valeur des espaces périurbains) qui représentaient, en 2022, 123 300 ha. Ces leviers sont relativement robustes, mais leur impact reste marginal au regard des surfaces concernées, indique Nicolas Agresti.
La consommation masquée de terres agricoles, en progression depuis la crise Covid, pèse également sur le foncier en détournant des surfaces de leur usage productif. Près de 18 000 ha par an sont ainsi utilisés pour du loisir, la mise à distance du voisinage, le stockage, ou encore de la spéculation, sans rien produire d’alimentaire. Les collectivités peuvent agir en préemptant une partie des terres concernées.
Le développement des énergies renouvelables
Un autre phénomène empiète également sur le foncier agricole, le développement des énergies renouvelables, pour répondre notamment à l’objectif de la neutralité carbone en 2050, soit une augmentation de 70 % de production d’électricité. Ainsi, le développement du photovoltaïque pourrait avoir une emprise de 75 000 à 100 000 ha auxquels il faut ajouter les surfaces nécessaires aux postes sources et aux réseaux, explique Nicolas Agresti. En parallèle, l’essor de la méthanisation risque également d’avoir des impacts sur la production alimentaire, en raison des besoins en biomasse qu’elle nécessite. Les collectivités peuvent agir à ce niveau grâce à la loi APER, qui leur permet de définir des zones d’interdiction, et d’accélération de la production d’énergie renouvelable.
Enfin, les collectivités peuvent également s’investir davantage sur la question de la compensation environnementale (éviter, réduire, compenser les pertes de biodiversité) en planifiant et en anticipant au maximum les projets, afin de limiter l’impact sur l’agriculture.