Régionalisation de la DJA, ce qui peut changer : exemple en région Aura
TNC le 14/10/2022 à 05:08
À partir de 2023, les mesures de la politique agricole commune sur l'installation et la transmission seront davantage régionalisées, la dotation jeune agriculteur ou DJA en particulier. Toutes les Régions s'y préparent. Au Sommet de l'élevage, le conseil régional a présenté ce qui est envisagé en Auvergne-Rhône-Alpes, après de nombreux mois de concertation entre les différents acteurs. Les critères concernant formation et l'environnement, pour lutter contre le changement climatique, ont été notamment renforcés.
La nouvelle programmation de la politique agricole commune débute dans moins de trois mois et entraînera dans son sillage un certain nombre de changements notamment en lien avec le Feader (Fonds européen agricole pour le développement rural). L’un d’eux, et non des moindres, concerne le renouvellement des générations en agriculture : les Régions auront davantage de pouvoir pour gérer les mesures sur l’installation et la transmission dans la Pac 2023-2027. Principal effet : la régionalisation de la DJA (dotation jeune agriculteur).
Par définition, cette aide, comme l’ensemble des dispositifs d’accompagnement, pourra donc varier d’une région à l’autre. Difficile alors de détailler ce que chacune prévoit à partir de janvier, d’autant que tout n’est pas encore calé même si elles y travaillent depuis plusieurs mois en impliquant les différents acteurs. Prenons plutôt un exemple, la Région Auvergne-Rhône-Alpes, venue présenter ce qu’elle envisage au Sommet de l’élevage. En se concentrant sur les principales évolutions par rapport au système actuel, « sous réserve des adaptations des textes réglementaires à venir », a tenu à préciser Anne-Cécile Gardet, chargée de mission au conseil régional Aura.
Éligibilité
- Date d’installation
Dans les 12 mois, à compter de l’engagement juridique.
- Revenu
→ Pour les personnes préinstallées, sur chacune des 3 dernières années :
Installation à titre principal : revenu disponible agricole (RDA) < 1 Smic annuel
Installation à titre secondaire : RDA < 0,5 Smic
→ En année 3 : un revenu professionnel global (RGP) < 3 Smic
- Plan d’entreprise (PE)
Un nouveau critère de contrôle.
Installation à titre principal : RDA ≥ 1 Smic
Installation à titre secondaire : RDA ≥ 0,5 Smic
(sauf circonstances exceptionnelles ou cas de force majeure)
+ Une analyse des risques sociaux et environnementaux (à partir d’un questionnaire) afin d’évaluer la durabilité de l’installation.
Les anciennes règles toujours valables : première installation aidée, être âgé de 18 à 40 ans, avoir un diplôme agricole de niveau 4 et un PPP (plan de professionnalisation personnalisé) validé, être chef d’exploitation à la MSA, détenir au moins 10 % des parts sociales lorsqu’on s’installe en société, resté agriculteur au moins 4 ans, tenir une comptabilité de gestion…
Modulation
- Formation/expérience(entièrement nouveau)
→ Avec : un diplôme agricole de niveau 5 à 8 (≥ Bac+2).
→ Ou : un diplôme agricole de niveau 4 + une expérience professionnelle ≥ 24 mois et ≥ 1 mi-temps sur les 5 dernières années en tant que salarié agricole (et non stagiaires et apprentis) en exploitations (sauf celle des parents et celle à reprendre), dans un service de remplacement ou un groupement d’employeur, ou sous contrat d’appui au projet d’entreprise (CAPE) dans un espace-test agricole, les trois pouvant se cumuler.
- Démarche de progrès (entièrement nouveau)
Le demandeur de la DJA doit prendre un engagement environnemental au sein de la ferme reprise ou de la société qu’il rejoint, ou de l’un de ses ateliers : SIQO (signes d’identification de qualité et d’origine tels que AB), MAEC, HVE, label bas carbone, adhésion à un GIEE, un réseau Dephy ou un groupe 30 000, mise en place d’au moins 70 000 ruches…
- Investissements (des nouveautés pour les sociétés)
Pour les installations sociétaires, sont pris en compte les investissements spécifiques au porteur de projet bénéficiant à l’exploitation. Ils sont proratisés selon le pourcentage de parts sociales. Le calcul de la modulation, lui, continue de s’effectuer sur la totalité des investissements inscrits dans le PE.
Valoriser la formation et l’expérience, inciter à préserver l’environnement.
« Il n’y a plus que trois types de modulation, la nouvelle programmation visant à simplifier l’octroi de la DJA, explique la chargée de mission. Le but est de valoriser la formation et les expériences professionnelles, via le salariat entre autres, ainsi que les actions menées en faveur de l’environnement. Ceci afin d’inciter les jeunes à s’ouvrir sur l’extérieur et les sensibiliser aux défis environnementaux qu’il devront relever. »
- Critères de sélection
Sont désormais étudiées la cohérence globale du projet, la mutualisation de l’emploi (groupement d’employeurs, service de remplacement) et/ou de l’équipement (Cuma, entraide, atelier de transformation collectif, etc.), et les démarches agro-environnementales au sein de l’exploitation avant et après sa reprise. Pas de modification en revanche quant à l’autonomie vis-à-vis des moyens de production et le revenu professionnel global maximum dégagé en fin de période d’engagement. Rappelons que des points sont attribués à chaque critère rempli.
Processus d’attribution
Dépôt du dossier (en ligne : nouveau)
↓
Analyse + notation
↓
Comité d’étude des projets
↓
Comité de sélection régional
↓
Décision Région
↓
Comité de programmation régional
↓
Décision juridique
Attention !
- Arrêt des dossiers papier : les demandes seront à déposer sur le site internet de la Région Aura.
- Suppression du passage en CDOA (commission départementale d’orientation agricole) mais création de trois nouvelles entités.
– Le comité d’étude des projets : il fournit un avis d’expert sur le projet d’installation en fonction des critères de sélection, mais n’a aucun pouvoir décisionnel ; il peut cependant différer un dossier (deux fois maximum) pour que le candidat puisse apporter des éclaircissements.
– Le comité de sélection régional : fixe les plans de financement, avis consultatif sur les demandes de DJA.
– Le comité de programmation régional : il programme les dossiers Feader et octroie les crédits.
« Malgré l’étape supplémentaire de la décision régionale, l’instruction ne devrait pas être plus longue », fait remarquer Anne-Cécile Gardet.
À noter, en plus :
– la mise en place d’un service installation/emploi/transmission au sein de la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf) d’Auvergne-Rhône-Alpes ;
– le transfert d’agents de l’État au 1er janvier 2023 ;
– le regroupement des instructeurs en équipes territoriales dans chaque département.
Montants
Montant de la DJA | ||
Montant de base | Zone de plaine Zone défavorisée Zone de montagne |
16 000 € 24 000 € 32 000 € |
Modulation formation/expérience | + 6 000 € maximum | |
Modulation démarche de progrès | + 6 000 € maximum | |
Modulation investissements | Plancher 100 000 € > 200 000 € > 300 000 € |
+ 6 000 € maximum + 9 000 € maximum + 12 000 € maximum |
Montant maximal | 56 000 € |
Soit un montant moyen visé de 40 000 €.
« Les montants de base ont été revalorisés et le montant maximal reste important, constate Anne-Cécile Gardet. Toujours dans un souci de simplification, le nombre de paliers a été diminué pour la modulation. »
Dispositifs complémentaires
- Bonification nouvel installé
Dispositifs | Taux d’aide socle | Taux d’aide maxi | Bonification nouvel installé |
Investir pour mon élevage | 30 % | 45 % | 5 % |
Limiter les risques climatiques et sanitaires sur mes productions végétales | 50 % | 80 % | 10 % |
Réduire l’impact environnemental de mes productions végétales | 25 % | 40 % | 5 % |
Investir dans des systèmes d’irrigation | 40 % | 70 % | 10 % |
Investir dans des productions végétales à enjeu de souveraineté régionale | 30 % | 50 % | 10 % |
- Coopération parcours installation
– Objectif : transmission des savoir-faire.
– Les bénéficiaires : toutes personnes engagées dans le parcours d’installation (passage au point accueil installation ou PAI), sans beaucoup d’expérience, ni encore de ferme où s’installer.
– Y participent : un agriculteur expérimenté (> 50 ans, > 5 ans de métier) et une structure d’accompagnement (notamment pour la partie administrative).
– Financement : participation, à hauteur de 50 %, à l’embauche du futur installé en tant que salarié par l’exploitant qui va le former (différent du stage de parrainage où il s’agit forcément du cédant ; ici la transmission au jeune est possible mais pas obligatoire, les deux dispositifs sont donc complémentaires).
– Durée : deux ans maximum.
– Entrée en vigueur : second semestre 2023
Aider les jeunes à acquérir de l’expérience.
Et les agriculteurs à s’ouvrir aux futurs repreneurs.
« Il ne s’agit pas de financer des besoins ponctuels de main-d’œuvre au sein des exploitations, met en garde Anne-Cécile Gardet. Mais d’aider les futurs installés, notamment les Nima (non issus du milieu agricole) à acquérir de l’expérience sur le terrain. Et les agriculteurs en place, qui devront transmettre un jour leur exploitation, à s’ouvrir aux nouveaux profils et besoins des repreneurs. » « Des contrôles seront donc pratiqués », ajoute la chargée de mission au conseil régional, qui « table sur 200 bénéficiaires en rythme de croisière ».