Sous la menace de guerre commerciale, les marchés agricoles dans l’expectative
AFP le 20/03/2025 à 09:15
Revenant aux fondamentaux - la météo et le volume des récoltes - les cours du blé, maïs et autres céréales ont tout juste frémi depuis une semaine de part et d'autre de l'Atlantique, les acteurs des marchés agricoles attendant surtout le prochain acte de la guerre commerciale promise par Donald Trump.
Le blé en particulier a gagné 0,62 % à la Bourse de Chicago entre mercredi et mardi, face aux menaces de sécheresse sur les cultures en Europe de l’Est et aux États-Unis, marqués ces derniers jours par de spectaculaires tempêtes de poussière dans les plaines du centre et du sud. Sur Euronext aussi, le blé a crû légèrement, à 225 euros la tonne mercredi. Or sur ces régions, le blé, à la sortie de l’hiver, est à une étape cruciale et a besoin d’eau.
Le soja américain s’est lui maintenu (+ 0,10 %), résistant, malgré les bonnes récoltes latino-américaines. En revanche, le maïs a cédé 0,17 %, la récolte s’annonçant meilleure qu’attendu en Amérique du Sud, et notamment en Argentine.
Pour Arlan Suderman, analyste à StoneX Financial, « le maïs ne suit pas le blé à la hausse », car les acteurs attendent de connaître les surfaces de culture à venir aux États-Unis. « Il y a beaucoup d’inquiétude quant à l’ampleur des chiffres » que le ministère américain de l’agriculture (USDA) doit publier le 31 mars sur les intentions des producteurs, dit-il.
Dans l’attente de nouvelles surtaxes
Globalement, l’incertitude entourant l’imposition de droits de douane et les rétorsions possibles pèse sur les marchés, expliquant « les hausses limitées (…) même sur le marché du blé », estime M. Suderman : « ces préoccupations douanières limitent la volonté des opérateurs spéculatifs de miser à la hausse à l’heure actuelle ».
« Quand les nouvelles sont minimes sur le front des droits de douane, le marché revient aux fondamentaux de l’offre et de la demande, aux conditions météorologiques et à la demande d’exportation », résume Michael Zuzolo, de Global Commodity Analytics and Consulting. Mais toute évolution concernant ces surtaxes « dominera les autres facteurs », ajoute-t-il.
Donald Trump a annoncé l’entrée en vigueur le 2 avril de droits de douane supplémentaires sur les marchandises de ses partenaires commerciaux, notamment leurs produits agricoles.
« On est dans l’expectative de ce que Trump va proposer », souligne Damien Vercambre, du cabinet Inter-courtages, relevant que les acteurs de marchés s’attendent à en savoir plus « dès la semaine prochaine ».
Pour les céréales, il faudra surtout surveiller les mesures de rétorsion, explique-t-il, rappelant que lors de la précédente guerre commerciale lancée en 2018 par Donald Trump contre la Chine, « les prix américains s’étaient cassé la figure », Pékin se tournant vers d’autres fournisseurs.
L’UE, qui exporte peu de céréales aux États-Unis mais en importe, a déjà inscrit le soja et le maïs américains sur sa première liste de sanctions.
Le maïs s’est d’ailleurs un peu raffermi cette semaine en Europe, « fort des annonces que l’UE pourrait mettre en place des taxes à l’importation en maïs », remarque Gautier Le Molgat, PDG d’Argus Media France, tout en soulignant que l’impact à ce stade n’est pas massif. Cela « permet avant tout de contenir, de stabiliser, après un fort mouvement de repli », dit-il.
Aux États-Unis, premier exportateur agricole mondial, les revenus de l’agriculture reposent à 60 % sur les ventes à l’étranger pour les céréales et 50 % pour les oléagineux (essentiellement du soja).
Les investisseurs attendent notamment de voir si une visite du dirigeant chinois Xi Jinping à Washington, évoquée par Trump, se confirme. Car alors, « nous aurions de meilleures chances d’éviter une guerre commerciale avec notre principal partenaire agricole, la Chine », juge M. Zuzolo.
La Maison-Blanche a relevé à 20 % les droits de douane supplémentaires appliqués à tous les produits chinois entrant aux États-Unis.
Pékin a répliqué en instaurant depuis le 10 mars jusqu’à 15 % de nouvelles taxes sur une série de produits agricoles américains, notamment le soja, le porc et le poulet.